SAINT-EXUPÉRY : Terre des Hommes (Gallimard)
Les deux précédents récits de Saint-Exupéry étaient beaux ; l'on
remarquait surtout en eux cette sobriété, cette austérité qui, seules, peuvent être
admises à nous convaincre du respect d'un héros pour son héroïsme. On peut définir
l'artiste : un homme à chaque instant averti qu'il en dit infiniment trop. Le récit
épique, lui, va volontiers au-delà de ce dépouillement : toute grandeur est pauvre, car
les moments où la vie d'un homme se durcit en destin sont merveilleusement rares et il
importe peut-être que nulle parole ne les puisse bien capturer. Saint-Exupéry le sait
mieux que personne, mais dans ce cas pourquoi s'être si peu défendu, cette fois, de la
tentation de commenter, c'est-à-dire d'affaiblir, parfois même de détruire? |