MARINE
Tout mets blase.
A toi seule fut donné d'être mets qui jamais ne blase.
Passent les jours,
Passent les ans,
Passent un millénaire, des millénaires.
Vêtue en blanche fougue des vagues,
Te cachant
Dans les blanches, épicées saveurs d'acacias,
Peut-être est-ce toi,
Mer,
Qui mènes, emmènes au « rien n'est! »
Grue remuée, source secouée,
Folichonnante, tu craquètes
Sur l'amas des filets tes prélassements !
Chez les enfants tu vas en visite.
Oh ! par quels inouïs ouragans
Tu répliques
Quand le lointain te hèle: « Rentre ! »
L'écume rend courroux, enroue
L'espace de l'avant-déluge.
Mais les mèches des courants à peine
Derrière l'oreille chatouillent les poupes.
Revenant du gouffre des ahans,
L'ingambe reflux
Saute en satan.
Tout se disloque, suit à part sa loque,
Hurle, périt selon son mode,
Dans la bourhe s'entombe en plomb,
Contre les pilotis cogne selon son mode.
La parallèle dérive
Des teintes aliénées
Dépasse, rejette
Les voiles à fadeurs d'eaux douces.
La muraille de l'averse approche;
En grandissante chute choit le ciel;
Oblique choit cette chute,
En culbutes voltige cette chute,
Avec les mouettes cette chute finit sa chute.
Cuisses dandinantes, chair lambinante,
Démarche disgracieuse,
Dans le port qu'ils vont fendant entrent les navires.
Pieds bleus joints, les éclairs
Sautent en grenouilles dans les flaques.
Les agrès aux hauts jarrets
On les jette sur les côtés
De tout côté.
Il n'y a qu'intentions de sieste, de ronrons.
Les crabes grimpent leurs grimpements de crabes;
Le crâne des bardanes
S'incline vers le très rond
Centre d'un soleil gros de ronrons.
Et la mer n'est qu'un « ronron »
Et cette ronronnante, une verste environ
De Tandra, pose en gribouillis les mille moucherons
D'une moucheture jaune citron
Sur l'échine d'un cuirassé, trapu grison.