Nicolas OSTROVSKY: Et l'acier fut trempé...
(E.S.I.)
Livre d'une faiblesse désespérante: de
l'épopée stagnante du jeune héros couché sur son lit de mort, tout s'est perdu; la
propagande stalinienne a tué ce mourant digne peut-être de clamer un beau cri. La
douleur sans doute ne semble pas « productive » dans cette nouvelle civilisation, la
plus industriellement et la plus bourgeoisement satisfaite que le monde risque d'avoir
vue.
Une telle Russie ne pourra plus connaître ni
Dostoïevsky, ni Essénine, ni Maïakovsky. Nul n'a créé avec de la béatitude
commerciale. |
Le roman d'Ostrovsky nous fait assister
à la formation de castes impénétrables l'une à l'autre, de groupes sociaux
impeccablement étiquetés. Nulle part le simple enthousiasme révolutionnaire ne passe,
car le peuple n'est nulle part: lorsque par hasard l'auteur s'oublie à le laisser prendre
place dans un train, vite il le refoule et s'excuse, car c'est en 1937 le seul crime qu'on
ne pardonne pas. Une telle Russie,
impitoyable à toute force populaire, ne pourra plus connaître ni Gogol, ni Tolstoï. Et
nul n'a créé avec du savoir-faire. |