Après la publication de mon premier livre de poèmes "Les temps obscurs", Armand Robin me fit l'honneur d'un excellent article dans la Nouvelle Revue Française. Pour le remercier, je l'invitai rue Saint-Joseph, à ma table. Une amitié allait naître qui ne serait pas facile, mais qui resterait fidèle.
« Tout ce qui n'est pas absolument naturel, m'afflige », écrivait Armand Robin. Dans un monde qui cherche à tout dénaturer, à tout falsifier, c'était là une déclaration qui ne pouvait que lui valoir l'admiration de ceux qui savent qu'il n'est rien qui vaille la simplicité d'une âme droite, exigeante pour elle-même et comme toujours obligée de tout remettre en question.
J'admirais en Armand Robin un poète authentique et un homme affamé de poésie. Si belle que fût la sienne, elle ne lui suffisait pas. Il se mit donc à apprendre des langues - on prétend qu'il en parla quelque vingt-cinq - pour pouvoir boire à la source des grands textes de l'Humanité.
Traducteur des poètes arabes et chinois, il était aussi celui de Giuseppe Ungaretti, de Serge Essénine, de Jean-Pierre Calloc'h et de Moadez Glandour.
Curieux de tout, revenu de beaucoup de choses, épris de justice, Armand Robin cherchait passionnément à quel bonheur peuvent conduire les pauvres mots, qu'emploient les hommes. Il parvenait pour son propre compte à une poésie originale qui comptera parmi les plus belles de notre époque.
Ce témoignage de Charles Le Quintrec est paru dans la revue La Bretagne à Paris du 18/11/1966, sous le titre A la mémoire de deux poètes qui honorent la Bretagne.