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Armand Robin : témoignages

- Jacques Chessex : portrait -

livrevieux.gif (469 octets)Je le revois encore chez Mermod. C'est l'été. Il y a un ou deux jours, un orage a cassé un vigoureux tulipier que nous nous amusons à débiter sur la pelouse. En manches de chemise, Robin scie avec ardeur, la noiraude entasse les bûches, Mermod nous apporte de grands verres de sirop. Un peu plus tard, dans la véranda, Armand parle d'Unga­retti. Il explique comment il traduit, comment il tente de restituer sa forme sonore au poème...

Voilà quatre mois qu'il est mort.

            Je revois son long sourire charnu, ses dents écartées, ses joues ridées, ses petits yeux plissés sous les lunettes tou­jours sales. J'entends sa voix étrangement chuintante, un peu enrouée, et cette parole saccadée, si souvent véhémente, emportée.,. Mais il avait de grandes tendresses pour ses amis, pour la Bretagne, pour Paris. Il était très savant mais il s'en excusait. Humblement, il disait qu'il se sentait for­tifié par toutes les vies des poètes qu'il avait traduits et qui avaient ainsi passé en lui.

Il a toujours vécu difficilement (l'histoire des lames de rasoir l'amusa, et il m'avoua qu'elle n'était pas tout à fait fausse) mais il n'y avait en lui nulle envie, aucune mesquinerie. Il savait être très doux, quoique railleur, et montrait en société une courtoisie et un humour exquis.

« Ce qui n'est pas absolument naturel m'afflige », écrivit-il dans son introduction à Poésie non traduite. Justement, ses propres poèmes ont cette liberté d'allure, cette claire sim­plicité (à force de science et de travail) qui approchent souvent la transparence de la poésie populaire.

 

Jacques Chessex, NRF, 10/1961