"L'uvre d'art véritable est opposition, rébellion et presque provocation; un être, armé de douleur et de joie aux profondeurs où les formes et les pensées se décident, à force de défier les menaces et les insinuations, les douceurs et les injures de l'éphémère, finit pas s'arracher à la toute-puissante indifférence des instants et par bâtir, au-dessus de la vie, sa vie." Dans ce premier texte connu de lui, il avait vingt-quatre ans, une dissertation d'agrégation sur Mme de Sévigné - un faux devoir - Armand Robin apparaît tel qu'il sera toujours jusqu'à sa mort dramatique, en révolte permanente. Comme un combattant engagé du mot, dans un courage persistant jusqu'aux apparentes incohérences voulues et assumées, toujours poétiquement. Dans une sorte de fidélité noire et farouche à ce qui était peut-être chez lui une non-idée de la vie, et aussi de l'uvre. Avec en même temps, une naïveté généreuse, directe à toutes choses, aux mouvements, aux paysages, aux êtres. Avec une remarquable disponibilité au jeu, à l'humour, à des jeux et des humours pas toujours innocents. Parfois même communication. Communiquer à tout prix - et faire se communiquer- par la traduction, le poème, la critique, la radio, l'information directe, le bulletin d'écoute, dans une oeuvre sans cesse éclatée, éparpillée comme une multiplication d'échos autour du cri d'un non-moi. Angoisse? Nihilisme? Plutôt le besoin anarchique et exigeant d'une sorte de fraternité presque inimaginable. |
Ce témoignage de
Marcel Bisiaux est paru dans La Quinzaine littéraire , 16-31 décembre 1986.