Robin et Brassens au Libertaire Dans ce groupe, il y avait Marcel Lepoil que Georges admirait beaucoup et qui devint son ami, Henri Bouyé et le poète Armand Robin. Armand Robin, l'homme qui connaissait non pas cinquante langues comme certains articles l'ont prétendu, mais dix-huit (nombre certifié par ses amis anarchistes), ce qui n'était pas si mal. Armand Robin qui écoutait les radios étrangères, à l'affût des nouvelles qu'il apportait ensuite aux journaux, qui le premier traduisit Pasternak, et des dizaines de poètes inconnus, bretons, flamands, arabes et même, l'un, tchérémisse (c'est une langue dérivée du finnois). Il aimait les oiseaux et les animaux. Il avait enlevé un jour le bâton blanc d'un agent de la circulation pour le remplacer par une fleur de lis. C'était aussi un grand poète qui « se traduisait lui-même » et que l'on a découvert seulement en 1964, trois ans après sa disparition. Armand Robin est mort à quarante-neuf ans, le 30 mars 1961, à l'infirmerie spéciale du Dépôt où il avait été conduit dans des circonstances imprécises; d'une embolie, dit la Police, mystérieusement, soutiennent ses amis. Un tel homme ne pouvait que plaire à Brassens. Eh bien, malgré son amitié, Robin lui-même boudait les chansons de Georges. Alors que Renot les écoutait avec recueillement, Robin, l'air ailleurs, grattait la tête de son chien. Brassens accusait le coup : « Tu as vu ce con, disait-il à Renot, me faire ça à moi!... » II est vrai que « con » dans la bouche de Georges, où ce mot chauffe en permanence, veut, selon ses intonations, tout dire. |
André Larue, Brassens ou la mauvaise herbe, éd Fayard, 1970 |