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Armand Robin
1912 - 1961 : éphéméride

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- 1942  -

janvier *** sans date : parution de La Jeune Poésie et ses harmoniques,  anthologie sous la Direction de  Albert-Marie Schmidt, éd, Albin Michel, coll. Saisir, qui contient aussi  des textes de Audiberti, Tardieu, Henri Thomas, Guillevic... De Robin, on y trouve : Pendant que l'enfant dort, daté de Noël 1941, deux traductions de Goethe à paraître dans le volume de la Pléiade, Mahomet et Chant, une traduction de Lermontov, Le Démon, et Prière, déjà paru dans Ma Vie Sans Moi.

*** sans date : visite de Marcel Laurent

*** sans date : donne à Jean Paulhan un de ses bulletins d'écoute pour la Résistance.

5 : Achevé d'imprimer du Temps qu'il fait, Imprimerie Moderne à Montrouge, Seine.

19 : Le Temps qu'il fait, éditions Gallimard, collection blanche. Dédié à Jacqueline Allan, "créature de poésie", alias Mme Robin / Dastros.
Voici le Prière d'insérer : Il faut que je me hâte de tout restituer au peuple ; c'est de lui que tous les sentiments de ce livre me sont venus; c'est à lui qu'appartiennent ici tous mes mots, pour peu que luise en eux quelque candeur de trèfle riant sous la faucille, quelque oeillade d'une rue entoilettée d'outils ; et si mon ouvrage a bientôt pris allure de poème épique, si je l'ai bientôt entendu résonner comme le chant d'annonce d'une future grande révolution de la douceur, c'est qu'il n'y a rien en lui qui ne m'ait été soufflé par quelqu'un de ces millions d'hommes qui, sans le savoir, se disent pendant leur travail : "Là où est l'amour, là est le véritable banquet !" En lui prenant ses paroles, ses rêves, ses certitudes, j'ai contracté une dette, très lourde et très douce, envers tout homme qui peine.
J'ai parlé de banquet. Bruyères, genets, ruisseaux, oiseaux, chiens et chevaux ont tous tenu à y venir, l'air plus aimant que curieux ; partout se faufilaient une aile, une patte, un museau ; j'ai laissé tout ce monde s'approcher ; j'aurais volontiers permis aux oiseaux de me becqueter chacune de mes phrases. Bref, voici un banquet d'où n'ont été écartés que les seuls méchants ; autant dire que tous y sont invités. Armand Robin
Le volume, vendu 33 fr, attire le regard grâce à son bandeau publicitaire en caractères noirs sur fond ocre : Un récit poignant dans le cadre de la Bretagne : le songe d'un Peuple, les espoirs du Peuple. On peut interpréter le sous-titre comme un engagement au côté des prolétaires. 
Il a été dit qu'en publiant sous l'Occupation, Armand Robin aurait fait acte de collaboration car il fallait solliciter le papier nécessaire à l'édition auprès des autorités allemandes, ce qui équivalait à faire allégeance. En réalité, ce droit au papier n'a été imposé qu'à partir du 27 avril 1942, soit 3 mois après la publication, qui ne contient d'ailleurs pas le "numéro de contrôle" délivré à l'occasion de la demande. Ce qui est vrai en revanche, c'est qu'en zone libre, il fallait obtenir l'autorisation de Vichy ; autant dire qu'on y pratiquait la censure. AR aura ainsi beau jeu d'expliquer que la liberté de créer sous l'occupation allemande existait bel et bien et était supérieure à ce qui était pratiqué en zone libre.
Un exemplaire numéroté mais sans date est envoyé à Drieu La Rochelle avec la dédicace suivante : "A Drieu, avec toute mon affection, ce livre que j'ai écrit en pensant à lui très souvent. Armand R."

22 : traduit le premier thème chinois, dédié à Paul Demiéville, professeur de chinois aux langues O "qui m'apprit la langue et surtout l'esprit de la Chine". Le texte sera expédié à Jean Paulhan en septembre 1957 avec la note suivante : j'interdis ce texte à la NNRF, cette revue ayant publié le fasciste Guillevic et le fasciste Clauderoy (sic). Il figurera pourtant dans Poésie non Traduite II . Annonce des traductions de fragments de Tchouang Tseu.

31 : nommé collaborateur technique 2e catégorie au ministère de l'information.

février 6 : Comoedia : témoignage sur la poésie : Je dois avouer que mes poèmes ont une qualité, une seule : c'est qu'ils sont poignants ; mais cela je le dois à tant d'autres : j'ai eu la chance d'être né dans le peuple, d'avoir entendu de simples gens improviser sans en avoir conscience des chants épiques authentiques comme du granit ; il me fut donné de converser longuement avec les plantes et les bêtes.

28 : Comoedia : Péguy, article critique

mars 21 : Comoedia : La garantie mallarméenne, article critique
avril Réorganisation au ministère de l'information: Paul Marion est écarté peu à peu tout en restant en titre. Mais c'est Pierre Laval qui dirige en fait directement les différents services, qui sont de plus en plus cloisonnés et imperméables.
mai *** Lettre à Drieu La Rochelle, lui promet "quelque chose pour la revue", mais pour le moment, travaille le chinois pour son examen. Voudrait publier les vers de sa femme. La promesse sera Quarante cris, traduction d'Essénine, à paraître en septembre.

15 : achevé d'imprimer anti-daté du 4e Cahier de l'Ecole de Rochefort, contenant l'oubli des Mots de Jacqueline Allan-Dastros. Mais la sortie en librairie sera effectuée en fait en octobre. D'autres textes de Jacqueline Allan paraîtront dans la NRF, les Cahiers Guy Levis-Mano et  La Main à Plume. Ce même cahier annonce des textes d'AR.

25 : Comoedia : Paul Eluard, article de critique

juin *** : voyage de présentation de Jacqueline dans la famille en Bretagne.

17 : lettre à Jean Bouhier, directeur des Cahiers de l'école de Rochefort pour le remercier de son article sur le temps qu'il fait et lui présenter sans lui en donner le nom, un écrivain exceptionnel, sa propre femme !

29-30 : 1er examen de Chinois (1ère année) ; reçu avec 14/20.

juillet  *** un vendredi : Jean Paulhan écrit à Jean Guéhenno : J'ai à te parler de Robin.
1
: lettre à Jean Bouhier : remerciements pour l'acceptation de L'Oubli des mots et promesse de lui donner quelque chose : ce sera Imrulquais. Beaucoup de travail 12 à 14 H / jour ; "Je  crois infiniment à la nécessité de faire le moins de bruit possible, de s'avancer discrètement dans son oeuvre, de travailler en espérant que ce travail n'aboutira que très longtemps après ..."

8 : lettre à JP : doit partir incessamment pour la Bretagne pour y enregistrer une émission de la radio de Vichy; promet son retour pour le 12-14.

21 : remerciements à Jean Bouhier à son retour de Bretagne; ne peut rien lui proposer pour encore : trop de travail (16h / jour) : "je ne m'en plains pas; au contraire; dans une telle prison de travail accepté avec joie, les poèmes soudain montent plus fort".

août  *** Lettre à mon père, poème qui paraîtra en décembre  dans l'anthologie La Jeune Poésie, collection Comoedia-Charpentier.
  Pas de vacances cette année : sa présence serait jugée indispensable au ministère, ce qui amènera le texte Vacances dans Comoedia, puis, remanié, dans  La Fausse Parole.

 17 : Comoedia : Léon-Paul Fargue, article critique

 25 : Comoedia : Paul Claudel, article de critique

septembre  1 : nrf : Essénine Quarante cris, traduction, reprise in Quatre poètes russes (1949) sous le titre De profundis quarante fois.

 12 : Comoedia : Vacances, article qui, remanié, figurera plus tard dans La Fausse Parole

 14 : Lettre de Jean Paulhan à Jean Guéhenno : Tant que notre ami Armand se bornait à assommer sa belle-mère (j'ai vu la pauvre dame avec la figure enflée) et à dormir trois nuis de suite dans la rue devant sa porte (au scandale de sa concierge) tout allait bien, à peu près. Il a fait beaucoup plus grave et j'ai de sérieuses raisons d'être inquiet. Surmené peut-être.

Le lendemain Guéhenno exprime son inquiétude.

octobre 1 : lettre à JP : a remis à Gaston Gallimard un 1er poème traduit d'Imrulqais; sollicite une aide pour l'achat du dictionnaire de chinois du père jésuite Sérafin Couvreur, qui vaut 350 F.

*** : 2 :(date peu sûre) :  se trouve en Bretagne, seul dans sa famille. Il écrit à Jean Paulhan une longue lettre où il fait le point de sa situation matrimoniale.... désastreuse. Jacqueline est jugée par la famille dépensière, orgueilleuse, insignifiante et surtout malhonnête : demande de colis alimentaires dont AR ne voyait jamais la trace. La belle famille a également poussé AR à collaborer à des journaux notoirement collaborationnistes ( "La gerbe" et "Le fait") pour gagner toujours plus d'argent. AR a toujours refusé mais il s'en est suivi des tensions exacerbées par le refus de Drieu de publier Jacqueline dans la nrf. Il avoue spontanément   avoir giflé légèrement sa femme. Par ailleurs il a appris que le mariage avait pour seul but de l'amener à nourrir la belle famille. Il estime aussi n'avoir pas eu le temps et la tranquillité d'esprit nécessaire pour écrire son oeuvre : ainsi le Temps qu'il Fait a été écrit essentiellement la nuit. En conséquence AR décide de déménager dès son retour à Paris et donne son adresse au ministère pour la correspondance : une séparation est donc envisagée, et l'attitude d'Eluard (témoin de Jacqueline au mariage civil) commence à agacer.

5 : visite à Jean Paulhan à la nrf

6 : lettre à Marcel Laurent : annonce un entretien accordé au Figaro Littéraire et qui paraîtra le 3 novembre. La photo annoncée n'y figure pas ! Il présente aussi ses amis : Paulhan, Guéhenno, Valéry, Drieu, "esprit très large et le plus tolérant des hommes".

*** : bleu à Jean Paulhan : "mardi matin" (sans doute 6 ou 13 octobre) : a écrit à sa famille pour les tranquilliser sur sa situation ; a réglé son problème avec sa femme "J[acqueline] est de plus en plus tout ce que j'aime"; veut déchirer sa lettre  du 2 octobre; va renoncer au journalisme alimentaire pour se consacrer à son oeuvre : "je sens que j'ai trop fait de choses pour de l'argent pour être poète encore".

13 : lettre à Jean Bouhier : a été chez l'imprimeur Debresse chercher les 100 exemplaires du cahier de l'école de Rochefort consacré à Jacqueline. Satisfactions et remerciements. Ne peut lui envoyer un exemplaire du Temps qu'il fait car il est épuisé.

14 : lettre à Jean Paulhan sur papier de la Présidence du Conseil : transmet sa traduction de Pasternak. A réglé son problème relationnel avec sa belle famille : elle ne s'occupe plus de leur couple, et depuis, avec Jacqueline, "c'est une nouvelle vie".

30 : Comoedia : James Joyce

novembre 3 : entretien donné au Figaro sur le temps qu'il fait et le don des langues étrangères: annonce un recueil de traductions d'écrivains : allemands, anglais, russes, arabes et justifie son renoncement à son expression personnelle : "Ecrire, est-ce le plus urgent? Ce besoin de vivre dans l'universel m'entraîne à considérer actuellement l'étude comme passant bien avant la création personnelle. Je pense aussi qu'une oeuvre gagne à être maintenue à l'écart le plus longtemps possible par son auteur et qu'elle doit jaillir de lui presque à son corps défendant, presque comme un défi à sa volonté ". Armand Robin - qui est en train de l'écrire - aurait-il pressenti le devenir de l'oeuvre qui allait devenir le Monde d'une Voix / Fragments ?

*** Inscription aux langues O en arabe littéral.

27 : Guéhenno demande à Paulhan de lui envoyer la traduction du Goethe d'AR.

décembre 1 : nrf : Boris Pasternak, Triptyque de la plus belle, traduction

2 : Achevé d'imprimer du Temps qu'il fait, 2e édition, reproduction à l'identique.

6 : lettre à Drieu : lui envoie un article consacré à Pasternak et Essénine : "je crois que la censure n'aura pas grand chose à y trouver" Il s'agit sans doute de l'article à paraître dans le numéro 348 de février de la nrf.

Panorama de la jeune poésie française, présentation et choix de René Bertelé : AR y publie  3 poèmes de Ma vie sans moi (Offrandes, Le portefaix des eaux, Travail de joie) et un extrait du Temps qu'il fait (Ce que dit Treithir).

30 : Agenda Jean Follain : Dîner chez Drieu La Rochelle : Armand Robin : énigmatique. Il saurait, dit-il, toutes les langues : il en est à sa troisième année de chinois. Il donne des leçons de grec à Drieu et à une jeune fille, en leur projetant un jour un film sur sa famille. Professeur à Versailles. Quoique peu argenté, il avait la meilleure radio qui soit et une motocyclette.

31 : lettre de voeux à JP: "grâce aux Russes, il est permis de souhaiter une bonne année 1943". Tout va pour le mieux dans son ménage depuis qu'il a "cessé de vivre avec 10 personnes"

*** : 3 lettres à JP: annonce des traductions de Tchouang Tseu et Lao Tseu (mais demande du temps d'étude du chinois), Goethe (Le Divan) et des traductions du russe. Transmet son bulletin d'information : "ne le montrez qu'à des gens sûrs". Séjour dans la Nièvre auprès de Jacqueline.

*** : Goethe, théâtre complet, la Pléiade : 3 pièces en un acte : Mahomet, Satyros, Les dieux, les héros et Wieland, traductions.  Monologue de Mahomet et Chant paraissent aussi dans La jeune Poésie et ses Harmoniques, 1942, ainsi que Le démon de Lermontov (traductions).

*** : Mme Robin, née Jacqueline Dastros, "a abandonné" définitivement le domicile conjugal au cours de l'année 1942 d'après le jugement de divorce à venir. En fait c'est son mari qui déménage au 50 rue Falguière, sous les toits. Quoique avalisée par le tribunal, la date est incertaine. Ce sera peut-être en 1943.

*** Entre août et décembre :  Parution de La Jeune Poésie, collection Comoedia-Charpentier, éditions Les Publications techniques, chez Charpentier : le volume contient 3 poèmes d'AR : Lettre à mon père (daté d'août 1942), le traducteur et Dieu. On y trouve aussi le seul portrait retrouvé de Robin au crayon : il y figure aux côtés notamment d'Eugène Guillevic et Jacques Audiberti.

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Dernière révision 10/05/2020
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