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Armand Robin : La poésie

oeuvres de jeunesse


                  


Crépuscule

Ce nuage, coiffé d’un ciel trop usagé,

A mouillé dans la mer l’âme d’un naufragé

Qui ressemble à nous tous. Ne lui soyez pas trop durs,

Sinon vous troubleriez l’horaire de l’azur.

La brume passe en croupe au corps d’un cheval blanc.

C’est l’heure où le soleil s’accroît d’étonnement,

N’ayant pas, comme nous, vu un été d’herbes pâles

Descendre pour offrir son amour aux cigales.

Le lièvre silence risque moins que le vent

De perdre son chemin en jouant brusquement

Au doux colin-maillard des arbres de la nuit.

 

-« Maman, cette ombre a mis des pattes de fourmi ! »

-« C’est pour mieux grignoter ton ombre, mon petit,

Et la perdre parmi les chiffons de l’oubli.

Cours plutôt empêcher ce paysan qui louche

De meurtrir les sentiers de ses jambes de fourche :

C’est le Réel : il faut lui briser sur la tête

Un vase blond cueilli parmi les violettes. »

 

-«  Si tu laisses partir ton petit sans bâton,

Imprudente, il sera prisonnier des chansons

Que chante mon amour quand il change de peine

Et devra dans mon feu compter sans perdre haleine

Les profonds cheveux noirs de ma claire amie. »

 

Mais l’enfant reparaît : des papillons de vie

S’appuient tendrement à son habit doré

Ou froufroutent  en chœur au long plafond des soirs.

--« Epingle-toi, maman, leurs ailettes d’espoir ! »

Elle sourit, songeant au bosquet des furets

Où la douleur n’osait sortir de son terrier.

 

                                  *

Le naufragé là-bas, le bandeau sur les yeux,

Le bandeau de la mer à peine bleue,

Le bandeau de toute la mort heure par heure,

Ne pourra jamais voir cet univers de joie

Qui se déroule en notre amour de jour en jour

Et nous, les trop heureux naufragés de la terre,

Nous devrions rougir de dire : « Je suis là. »




Armand Robin, [1936] envoyé à Jean Paulhan en octobre 1936 . Pour en savoir plus sur les circonstances de l'écriture voir l'éphéméride à l'année 1936



 

     Poésie personnelle
          Ma Vie Sans moi